29/10/2018

À propos de mon roman, Chimère(s)






     Il y a de ça environ un an, dans la foulée de la rédaction mon recueil de nouvelles, il me restait pas mal de "jus" disons, suffisamment en tout cas pour enchaîner sur la rédaction d'autre chose, d'autant plus que j'étais pris dans une relation toxique sur le point de s'achever en une sale rupture, et que j'étais au bord de faire une grosse connerie. Et une vraie grosse connerie, pas ce qu'on appelle abusivement une grosse connerie comme aller voir Taxi 5 au ciné par exemple, ce qui n'en reste pas moins une grosse connerie certes, mais je m'égare.

     J'avais le début, j'avais la fin, j'avais le fil directeur. Et surtout, j'avais des tas de trucs à exorciser, bref, tout ça bouillonnait et ne demandait qu'à sortir. Et c'est sorti assez vite d'ailleurs, il me semble que le premier jet a été craché en environ trois semaines, ce qui est relativement peu au vu des 215 pages que prennent le récit.
     Après, j'ai laissé reposer tout ceci en me disant que de toute façon, ça ne valait pas un sou ; mais au moins ce travail m'avait-il empêché de faire une grosse connerie (non, rien à voir avec Taxi 5 non... 'fin n'empêche, si on pouvait me rendre les 7 euros que j'ai perdu dans cette histoire quand même... bref, passons), et c'était déjà bien.
     Sauf que ce roman m'obsédait, et m'obsédait même tellement que j'ai commencé à y revenir de temps à autre, parce que des éclairs me foudroyaient le crâne et exigeaient que je retouche un truc par-ci, un truc par-là ; et avant que je ne m'en rende compte, j'en étais à m'y replonger quasiment tous les jours pour le remanier, dégraisser ce qui prenait trop de place, dégager ce qui ne marchait pas, et affiner ce qui marchait. 
     Bref, sans vraiment en avoir conscience, je me retrouvais à réécrire ce bouquin non plus pour moi et éviter de faire une grosse connerie (cela dit ça ne m'a pas empêché d'aller voir Taxi 5, maintenant que j'y pense) ; mais dans l'optique qu'il soit lu parce que tout compte fait, je trouvais que l'histoire était tout de même assez valable pour possiblement intéresser une poignée de personnes. C'est que des aventures impliquant des détectives privés teigneux, des démons, beaucoup d'alcool, des bagarres, des flingues, des épreuves à endurer, le Diable, une destination mystérieuse et peut-être même une princesse à sauver à la fin ; il en existe pléthore depuis la nuit des temps (certes, peut-être qu'elles ne mêlent pas tous ces éléments en même temps, mais bon... je suppose qu'on ne se refait pas). 
     Ces récits existent, existeront probablement toujours, il y a donc un public pour cela. Si mon petit roman peut parler à certains, tant mieux, je serai déjà content.

     Donc voilà, le bouquin est là, il existe, et c'est déjà pas mal.
   Maintenant si vous voulez le lire, vous savez ce qu'il vous reste à faire, il sera même bientôt disponible en broché sur Amazon pour les puristes réfractaires aux liseuses ; et pour son lancement, l'édition numérique est soldée jusqu'au 1er Novembre (rendez-vous sur Kobo ou Amazon).
     Reste un problème, néanmoins : putain, mais pourquoi je suis allé voir Taxi 5 ?! 

24/10/2018

Cinéma : Halloween (2018)






   Ce qui est paradoxal avec Halloween, c’est que le premier film a inauguré un genre (le slasher, pour les cancres du fond qui n’auraient pas suivi) avant que le reste de la saga ne passe son temps à courir après les modes successives. Ainsi, les second et quatrième films de la série tapaient dans le gore outrancier et le rythme frénétique, s’autorisant même des incartades qui lorgnaient du côté de l’action, en raccord avec la saga Vendredi 13 qui dominait alors le genre. Le cinquième film lorgne ouvertement du côté du fantastique, achevant de faire de Michael Myers un monstre surnaturel évoluant dans un domaine qui l’est tout autant, à l’image de Freddy. Le sixième enfonce le clou en évoquant ouvertement secte et magie, domaine alors très prisé par Chucky et ses délires vaudous. Enfin, H20 et Resurrection sont clairement des néo-slashers de la vague post-Scream, allant jusqu’à laisser à Kevin Williamson, architecte de Scream, les coudées franches sur H20. Et il y a bien sûr les deux films de Rob Zombie qui, en plus de surfer sur la vague de remakes qui frappait alors le genre, plongeaient dans la brutalité la plus âpre qui était à l’époque la norme et dont Zombie fut d’ailleurs l’un des instigateurs.
  Pour le meilleur comme pour le pire, la saga a toujours su évoluer avec son temps. Il n’y a donc rien d’étonnant à voir ce Halloween 2018 être un pur produit de son époque. S’il avait été malin, le film se serait inscrit dans une vague plus naturaliste héritière de Mandy Lane (pour citer le meilleur exemple de cette vague) ; ou post-moderne façon The Strangers Prey At Night ; ou même, s’il avait ne serait-ce qu’un neurone valide, à l’étude relativement futée d’un grand nom du genre par ceux qui l’ont vécu de l’intérieur, façon Scre4m.
   Sauf que Halloween 2018 n’est pas un film malin. C’est un film profondément con. Con, opportuniste, et mensonger. Et en conséquence, sa façon de coller à son époque sera celle usitée par des machins comme The Predator ou Terminator Genysis : se réapproprier sans vergogne un héritage pour le dévitaliser et le dégueuler en un produit conforme apte à plaire au plus grand nombre.

  Que les choses soient claires : les gens derrière cette daube ont beau gueuler sur tous les toits qu’ils ignorent 40 ans de franchise, il n’en est rien. Pire encore, ils reprennent ce qui a le mieux marché jusqu’ici dans la saga pour le mêler en un tout incohérent, le classicisme de Carpenter se mariant fort mal à la brutalité dégueulasse de Zombie, qui elle-même n’a aucun rapport avec la posture méta de Williamson. Et pourtant, le film réchauffe le déroulement du premier film, le marie au gore de Zombie et y ajoute une Laurie alcoolo et parano tout droit sortie de H20. 
  Problème : la démarche de Zombie faisait partie d’un tout cohérent visant à ré-imaginer l’ensemble de la franchise, de même que la Laurie de H20 s’accompagnait de questionnements méta autour de l’héritage du premier film. Mêler ces deux aspects dans une franchise, ça marche, chaque épisode a son propre ton et retravaille, dans son cadre bien délimité, ce qui a précédé. La même chose en seul film ? Un merdier.
  On se retrouve donc avec un film qui, à l’image de Zombie, prétend déstructurer toute la recette Halloween, tout en lui rendant un hommage appliqué en recopiant Carpenter parfois au plan près. Déjà, le premier gros souci se pose : il est impossible de déconstruire ce que l’on prend, en parallèle, bien soin de ne pas retoucher. Ajoutez-y à cela des thématiques méta qui viennent s’y greffer lourdement, et l’ensemble a tout du foutoir sans queue ni tête. 

  Parce que voilà : un film qui respecte et qui déconstruit et qui s’interroge sur l’héritage pour mieux le sublimer tout en le démolissant et en s’interrogeant sur cette démolition pour mieux sublimer l’original pour mieux s’interroger pour finalement… Euh, on en était où, déjà ? Si les mecs avaient eu conscience de cette impasse, le film n’existerait même pas. Mais cela voudrait donc dire qu’il a été pensé. Or, la seule motivation derrière ce film n’était de toute évidence pas artistique, mais financière : Carpenter, Zombie et Williamson se sont retrouvés pompés dans tous les sens non pas car leurs apports étaient les plus marquants à la saga mais juste parce que leurs films ont cartonné plus que les autres épisodes.
  À l’image, la démarche est flagrante : je te sers du Carpenter comme base, je t’y ajoute du Zombie, je te le saupoudre de Williamson et puis on verra ce que ça donne. Tant qu’à faire, on y rajoute quelques éléments piochés par-ci par-là au fil de la saga (un meurtre recopié de Halloween 2, un perso secondaire échappé de Halloween 6 et au passage, ce film étant une belle purge, fallait quand même oser y piocher quelque chose mais j’imagine qu’arrivé à un certain point, on n’est plus à ça près). Et puis bien sûr, on oublie pas d’y mettre Michael Myers, et tant pis si on ne sait pas quoi en foutre vu que le malheureux s’y retrouve complètement paumé, triste automate désincarné qui n’a aucune ligne directrice et qui se retrouve donc à dégommer tous ceux qu’il croise à la va-vite, comme un Jason du pauvre (un comble). Myers est un tueur, donc il tue ; comme le Predator chasse et comme le Terminator termine. Lui donner un semblant de corps ? Non mais mon grand, on fait pas du ciné là, on fait du biz’.
  On s’en fout que Myers ait toujours eu, même dans ses pires épisodes, un objectif clair ; comme on s’en fout que McT ait fait du Predator une figure capable de terroriser Schwarzy ou que Cameron ait érigé le Terminator en un questionnement ambulant sur l’Humanité. On est là pour récupérer des figures et te les refourguer à bas prix.
  T’as du sang et des jump-scares ? Bon bah t’as de l’horreur, ça vole pas haut mais ça fera sursauter le pré-ado de base, c’est suffisant pour encaisser son billet. T’as du clin-d’œil, de la référence aux autres films de la saga (tiens, on t’as même mis des gamins avec des masques Silver Shamrock pour titiller le fan de Halloween III, c’est cool nan ?) et une déférence (surjouée et factice) envers le film matriciel ? C’est bon, le fan intégriste (et con, l’un ne va pas sans l’autre) qui surveille sa saga comme s’il en était responsable aura de quoi se palucher sur divers forums, ça aussi ça fera pleuvoir les billets. Peu importe au passage que l’audace et la vision foutent le camp, peu importe que ce soient justement ces éléments qui aient rendu ces diverses figures cultes, tant que le profit immédiat est là, tout va bien.

  Véritable bidon de lessive symptomatique de son époque, Halloween 2018 n’est là que pour contenter le spectateur adolescent occasionnel qui vient se gaver de pop-corns en reluquant le film entre deux posts sur Facebook, et le geek teubé qui refuse que l’on touche à « ses » mythes, sans comprendre que c’est justement l’audace qui a permis à ces mêmes mythes d’exister. Triste constat, triste époque, d’autant plus que ça marche (démarrage record aux States).
  Il ne reste donc plus qu’à assister à l’agonie de Michael Myers, passé à la lessiveuse du capitalisme le plus abrutissant qui soit, en espérant tout de même que cela ne signe pas par extension la mort du slasher. Mais quand on sait qu’une suite est déjà en prépa, c’est hélas probablement le cas.
  Putain, que je hais ce film.